Sélection

Histoire(s) de camps

Les camps  de réfugiés ont été officiellement fermés en Europe en 1966, mais ont-ils vraiment disparu ? L’accueil de populations déplacées, dans le respect de leur dignité et de leur altérité, pose toujours problème. 
Balises vous propose une sélection sur l’histoire des camps, pour accompagner la rencontre Après les camps… Exil et mémoires des camps de réfugiés, organisée par la Bpi.

Au 16e siècle, les flux migratoires de masse s’effectuent principalement de l’Europe vers le reste du monde. Les déplacements de populations s’intensifient avec la révolution industrielle, à la fin du 19e siècle mais cette fois entre pays d’Europe et entre campagne et ville. Le phénomène  devient plus important encore au 20e siècle, quand les populations civiles sont utilisées comme arme tactique dans les conflits. Il a fallu alors gérer l’accueil et le regroupement de ces déplacés. Les casernes ou hangars militaires ont bien souvent servi de refuge, mais aussi les maisons de particuliers, des baraquements ou autres abris précaires construits à la hâte, ces refuges n’étant pas destinés à perdurer.

vue du Camp Joffre derrière des barbelé
Camp de Riversaltes, By Yeza (Own work), [CC-BY-SA-3.0], via Wikimedia Commons

Dans ces camps se succèdent divers profils : familles, déportés, prisonniers politiques, travailleurs forcés, décolonisés… Et les camps s’adaptent, s’éloignant de leur objectif humanitaire pour répondre aux nouveaux problèmes qui se présentent. Le camp de Rivesaltes, en France, en est un exemple : de « Camp militaire » en 1939, il est devenu « Centre d’hébergement », puis « Centre inter-régional de rassemblement des Israélites »,  « Centre de séjour surveillé », dépôt de prisonniers de l’Axe, qui seront remplacés par des combattants FLN, transformé en camp de reclassement pour les harkis, pour finir en Centre de rétention administrative… Malgré la mission de fermeture des camps européens confiée au HCR (Haut-commissariat aux réfugiés), les camps perdureront jusqu’en 1966.

Pour autant, les camps ont-ils disparu en Europe ? « Le manque de visibilité de ces camps contemporains ne signifie pas leur non-existence. » rapporte Gatien Du Bois dans « L’Europe des camps« , Nouvelle Europe [en ligne]. La politique européenne en matière de migrations s’est durcie et laisse bien souvent les camps aux portes de l’Europe. Il existe toujours une gestion des migrations avec regroupement dans des centres de rétention, des centres de tri, qui parfois débordent et deviennent des camps non-organisés comme à Calais. Il arrive aussi que des lieux de rétention soient établis sur le site d’anciens camps. Le réseau Migreurop qui lutte contre la multiplication établit des cartes de ces  lieux de regroupement ou d’enfermement en Europe ou à ses frontières.

Étudier ces camps et la vie de ceux qui ont transité par ceux-ci permet de mieux comprendre la condition de réfugié et l’évolution de ce statut en Europe.

Migrant jouant au balon
By VOA- Nicolas Pinault [Public domain], via Wikimedia Commons

Publié le 01/03/2018 - CC BY-SA 3.0 FR

Sélection de références

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Musée national de l'histoire de l'immigration

Des dossiers thématiques, des films, des images d’époque, des repères… Les ressources sur l’histoire des migrations sont nombreuses. Le dossier Terre d’accueil, France hostile présente l’évolution de la figure de l’étranger selon les époques. De nombreux articles sur les camps à différents moments de l’histoire : le camp de Rivesaltes, le camp de harkis de Saint-Maurice-l’Ardoise (Gard) entre 1962 et 1976, le camp des Milles qui accueillait des réfugiés allemands en 1939… Également, des documents sur l’histoire contemporaine.

Les Réfugiés en Europe du XVIe au XXe siècle

Olivier Forcade
Nouveau Monde, 2008

Le civil réfugié (ou déplacé, déporté) est au cœur des conflits du XXe siècle et instrumentalisé par les parties en présence. Les déplacements contraints de populations pour différents motifs se succèdent et rythment désormais l’histoire de l’Europe. L’étude de chaque exode dans son contexte permet de nourrir et de construire la réflexion nécessaire autour du phénomène migratoire. L’ouvrage revient donc sur divers mouvements de populations et étudie comment ils ont été gérés et ce qu’ils ont apporté.

À la Bpi, niveau 3, 940.1 REF

De l'exil à la résistance : réfugiés et immigrés d'Europe Centrale en France 1933-1945

De l'exil à la résistance : réfugiés et immigrés d'Europe Centrale en France 1933-1945

Université Paris-8
Presses Universitaires de Vincennes, 1989

Dans l’entre-deux-guerres, la France est devenue le premier pays d’immigration. Les camps ont essaimé sur le territoire pour accueillir tout à tour les réfugiés des différents conflits d’Europe. Plus de 200 camps se sont constitués entre la troisième et la quatrième république. Ces réfugiés et immigrés ont joué un rôle important dans l’histoire de la France et celle de la Résistance.
Cet ouvrage cherche à cerner l’identité des personnes déplacées, entre vécu et histoire. Il comporte de nombreuses données statistiques.

À la Bpi, niveau 3, 944-858 DEL

Après les camps. Traces, mémoires et mutations des camps de réfugiés

Clara Lecadet & Jean-Frédéric de Hasque (dir.)
Université Catholique de Louvain, 2018

Cet ouvrage porte sur la formation et les modalités d’inscription et de transmission d’une mémoire des camps de réfugiés, ainsi que sur les enjeux de leur institutionnalisation.

À paraître

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Se souvenir des camps français : le mémorial de Rivesaltes

Le « Camp Joffre », à Rivesaltes a été construit en 1939, pour permettre le transit des troupes coloniales. Durant sept décennies, des populations civiles et des sodats vaincus ont été regroupés et retenus sur ces lieux. Le camp a changé plusieurs fois de statut en fonction du profil des détenus jusqu’en 2007. Aujourd’hui, un mémorial conçu par l’architecte Rudy Ricciotti et inauguré par le Premier ministre français en 2015 occupe le site aux côtés de baraquements en ruines.

Parler des camps au XXIe siècle : les étapes de la migration

Alain Rey
Guy Trédaniel éditeur, 2015

Alain Rey, linguiste, et Guillaume Lavit d’Hautefort, photographe, s’associent pour parler des camps et de l’ambiguité de ce mode d’accueil, entre humanité, précarité, enfermement… Alain Rey donne à réfléchir en rappelant le sens et l’histoire des mots tandis que Guillaume Lavit d’Hautefort illustre la force de la vie à l’aide de ses images.
Voir la présentation du livre par ses auteurs sur la chaîne YouTube de TV5Monde

À la Bpi, niveau 2, 31.2 REY

Gérer les indésirables : des camps de réfugiés au gouvernement humanitaire

Michel Agier
Flammarion, 2008

Le HCR recensait, en 2002, 4,5 millions de réfugiés hébergés dans ses camps dont 14 % en Europe. L’encampement officiel était estimé à 12 millions de personnes en 2007, auquel il faut ajouter les camps auto-installés, les centre de rétention, les zones d’attente en Europe et Afrique du Nord. L’auteur, anthropologue, décrit l’organisation de ces camps qu’il classe en catégories distinctes : les refuges auto-organisés, les centres de tri, les espaces de confinement, les réserves non protégées. Une étude qui met en lumière les paradoxes de l’humanitaire.

À la Bpi, niveau 2, 365.9 AGI 

Un monde de camps

Michel Agier, avec la collaboration de Clara Lecadet
La Découverte, 2014

Cet ouvrage raconte l’histoire de plus d’une vingtaine de camps à travers le monde et la vie des personnes sur place : du plus ancien, à Chatila au Liban, au plus grand, à Dadaab au Kenya, des plus organisés aux plus informels… Michel Agier décrit également le camp de Calais, celui du Hanul à Saint-Denis, ou encore celui de Lampedusa, véritable « laboratoire de rétention en Europe »…

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