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Appartient au dossier : Le génocide rwandais, vingt ans de publications

S’interroger et débattre

Il y a peu de sujets contemporains aussi controversés que le génocide des tutsi et des hutu modérés au Rwanda. Il est vrai que, d’un point de vue historiographique, la proximité temporelle des évènements est problématique.
Objet d’un corpus documentaire de grande ampleur et en constante évolution, le drame rwandais suscita un travail de réflexion considérable. Un tribunal international et des commissions d’enquête furent mises en place, pour lesquels des centaines de spécialistes investiguèrent. Un travail éditorial et cinématographique d’analyse et de mémoire fut entrepris. Savant ou romanesque, il tentait de percer les mécanismes du génocide et de donner la parole à ses acteurs.
Malgré cette abondante littérature, de nombreuses questions restent sans réponse. Des zones d’ombre qui alimentent le débat d’idées, mais aussi la rumeur, l’invective et des errements idéologiques dont la négation du génocide est le point d’orgue.

Pour aborder certaines de ces controverses, quelques lectures vous sont ici proposées. 

Sommaire
La France au Rwanda: quelles responsabilités ?Le rôle du Front Patriotique Rwandais en débatFocus sur… des ressources multimédias

La France au Rwanda: quelles responsabilités ?

Présentes au Rwanda depuis 1990 aux côtés du président Habyarimana, qui souhaitait stopper l’avancée du FPR,, les forces armées françaises sont parties après les accords d’Arusha.
Revenues sur le territoire rwandais pendant le génocide, elles furent déployées en juin 1994 sous le nom de code « Opération Turquoise ». Officiellement pour protéger ses ressortissants, puis pour raisons humanitaires.
De nombreux acteurs (journalistes, universitaires, militants associatifs, hommes politiques…) s’interrogent cependant sur son rôle réel et sur les liens qui unissaient les armées françaises et rwandaises. Après une Mission d’information parlementaire (1998), une Commission d’enquête citoyenne (2004) et de nombreuses parutions, la question reste ouverte sur l’intentionnalité et la teneur de la complicité française dans le génocide. 
 

horreur


L’Horreur qui nous prend au visage : l’Etat français et le génocide : rapport de la Commission d’enquête citoyenne. Sous la direction de Laure Coret, François-Xavier Verschave. 
Karthala, Paris, 2005
Transcription des témoignages recueillis par la Commission d’enquête citoyenne. S’intéresse aux complicités militaires, financières et diplomatiques, ainsi qu’au traitement de l’opération Turquoise dans les médias français. 
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) HOR

Olivier Lanotte


La France au Rwanda (1990-1994) : 
Entre abstention impossible et engagement ambivalent. 
Olivier Lanotte.
PIE – Peter Lang, Bruxelles, 2007
Le propos de cet ouvrage est de décrire, d’analyser et d’expliquer le processus de prise de décision ayant conduit François Mitterrand à engager l’armée française au Rwanda entre 1990 (qui voit le retour armé des anciens réfugiés rwandais réunis au sein du Front patriotique rwandais) et juillet 1994 (fin du génocide). L’étude menée ici récuse à la fois ceux qui encensent la politique de la France et ceux qui la condamnent sans discernement en évoquant une «complicité» coupable. 
De toute évidence, les divergences d’analyse sont d’envergure. Quelles étaient les motivations réelles de la présence française au Rwanda ? Au-delà du constat d’échec de cette ingérence, quels facteurs ont contribué in fine à ruiner les effets de la politique prônée par François Mitterrand ? Quel crédit, enfin, accorder aux accusations de «complicité de génocide» proférées à l’encontre des soldats de l’opération Turquoise ? La France serait-elle la seule nation coupable?
À la Bpi, niveau 2. 325.91 LAN

inavouable

L’Inavouable : la France au Rwanda.  Patrick de Saint-Exupéry. Les Arènes, Paris, 2004.
Sous forme de pamphlet, Patrick de Saint-Exupéry dénonce la politique française au Rwanda. Il retrace la genèse de l’engagement de Paris aux côtés de Juvénal Habyarimana, concrétisé par la présence de militaires français, analyse les étapes de leur collaboration, évoque des livraisons d’armes aux forces rwandaises, et épluche le rapport de la mission parlementaire de Paul Quilès. 
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) SAI

silence turquoise

Silence turquoise : Rwanda, 1992-1994 : 
responsabilités de l’Etat français dans le génocide des Tutsis. 

Laure de Vulpian, Thierry Prungnaud. Don Quichotte, Paris, 2012.
Une nouvelle contribution au débat sur les responsabilités françaises. Après une description des politiques au Rwanda depuis 1990, Laure de Vulpian revient sur les procédures judiciaires engagées par les juges Bruguière puis Trévidic, sur la complicité supposée des militaires français avec les tueurs, et interroge le rôle humanitaire de Turquoise. 
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) VUL

histoire à vif

L’histoire à vif, la France au Rwanda
Revue XXI – Printemps 2010
Joliment illustré, ce numéro revient sur le drame de Bisesero à travers l’histoire d’un militaire français qui désobéit, évoque la veuve du président Habyarimana, réfugiée en France, et Paul Barril, ancien gendarme de l’Elysée ami des extrémistes hutu.
À la Bpi, niveau 2. 0(44) VIN

Lire aussi : 

« On estime que l’opération Turquoise a sauvé entre 15 000 et 17 000 personnes menacées (10 000 à 15 000 selon Lanotte). Mais les militaires français n’ont pas désarmé les milices, ni les forces armées rwandaises qui se trouvaient sur la ZHS (Zone Humanitaire Sûre). Enfin, Turquoise n’a pas aidé à l’arrestation des responsables des massacres qui s’étaient réfugiés dans la ZHS et ont pu s’enfuir vers le Zaïre. On ignore toutefois si les troupes françaises ont aidé ces responsables à organiser leur fuite ».

Disponibles à la Bpi, dans la base de données CAIRN, sur les postes multimédias.

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Le rôle du Front Patriotique Rwandais en débat

Autre objet de débat: les atteintes aux droits de l’Homme commises par les forces armées du FPR lors de leur avancée sur le territoire rwandais puis dans les camps de réfugiés du Congo-Zaïre. 
Car s’il n’est pas question de nier que le FPR a su arrêter le génocide et sauver, de ce fait, des milliers de vies tutsi promises à une mort certaine; de nombreux auteurs évoquent aussi les violations massives des droits de l’Homme dont il s’est rendu coupable.
Parmi eux, Alison Des Forges et la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, André Guichaoua, Claudine Vidal ou encore Gérard Prunier dans Rwanda, 1959-1996: histoire d’un génocide (1997).

aucun temoin ne doit survivre


Aucun témoin ne doit survivre : le génocide au Rwanda. 
Human Rights Watch – Fédération internationale des ligues des droits de l’homme. Direction Alison Des Forges. Karthala, Paris, 1999
Alison Des Forges et ses collaborateurs répertorient avec force détails dans le chapitre « Le Front patriotique rwandais » les crimes de grande ampleur perpétrés par le FPR: contre des présumés génocidaires mais aussi contre des civils hutu, avant et après le génocide: pillages, enlèvements et massacres de civils, exécutions sommaires, entrave à l’aide humanitaire… 
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) AUC

defi de l'ethnisme

Le défi de l’ethnisme : Rwanda et Burundi.
Jean-Pierre Chrétien.
Karthala, Paris, 2012
Jean-Pierre Chrétien déconstruit ici les discours qui minimisent le génocide (négationnisme, théorie du « double génocide », justifications des massacres…). Sans vouloir nier les crimes de guerre commis par les unités armées du FPR, il dénonce l’amalgame systématique entre une entreprise d’extermination totale organisée par un Etat et des massacres de représailles.
À la Bpi, niveau 2. 328 (67) CHR

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Focus sur… des ressources multimédias

Un article en ligne : 

En 2012, le journal Le Monde proposait l’article « La communauté scientifique se déchir« . Pour comprendre les divergences qui opposent la communauté scientifique française autour de la question du Rwanda (Jean-Pierre Chrétien, André Guichaoua, Bernard Lugan, Gérard Prunier, Claudine Vidal…).
Disponible en texte intégral dans la base de données Europresse, sur les postes multimédias. 
Espace presse.

Une conférence en ligne : 

capture écran web radioEn 2009, la Bpi invitait deux chercheurs associés à l’Encyclopédie en ligne des violences de masse
Christophe Jaffrelot, spécialiste de l’Inde, et Danielle De Lame, anthropologue spécialiste du Rwanda. 
Ils évoquent tous deux la difficulté de leur tâche et les problématiques liées aux recherches sur les crimes de masse.
 A écouter en ligne sur la Web TV/Web radio de la Bpi

Des émissions de radio : 

france inter

En 2012, la journaliste Laure de Vulpian proposait sur France Inter un reportage pour le magazine « Interception« :
Dans « Rwanda, sur la piste de la vérité« , elle enquête sur les tirs de missiles qui ont frappé l’avion du président Habyarimana le 6 avril 1994. Cet attentat, qui a aussi tué des militaires français, a fait l’objet d’une enquête judiciaire, menée par les juges Jean-Louis Bruguière (2006) puis Marc Trévidic (2012). 
Laure de Vulpian revient sur les controverses de cette instruction.

En 2004, l’émission de reportages « Là bas si j’y suis« , également sur France Inter, recevait François-Xavier Vershave, président de l’association « Survie« , et Patrick de Saint-Exupéry, auteur du livre L’Inavouable: la France au Rwanda.
L’émission est à écouter ici.

france culture

En 2012, Laure de Vulpian proposait sur France Culture « Le Mystère Didot et Maïer« .
Son reportage évoque le meurtre de deux gendarmes français en poste à Kigali, assassinés juste après l’attentat du 6 avril.
 
La même année, le Magazine de la rédaction s’intéressait à l’instruction judiciaire menée par Marc Trévidic: 
Dans les pas du juge Trévidic au Rwanda

rfi

En 2013, l’émission « Mémoire d’un continent« , sur RFI, invitait le chercheur François Robinet. 
Dans « Rwanda, Côte d’Ivoire, Mali : trois conflits au regard des médias français« , il questionne la représentation du génocide rwandais et de l’Opération Turquoise dans les médias français.

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Publié le 05/05/2014 - CC BY-SA 4.0